Pour le sociologue français E. Durkheim (1897), le suicide est un phénomène profondément social et le fait suicidaire dépend de la qualité du lien social.
Le suicide expliqué par la sociologie
Pour le sociologue, le suicide n’est pas seulement sous-tendu par des causes psychologiques mais est influencé par des situations socio-économiques défavorables pour l’individu : difficultés relationnelles, problèmes professionnels, maladies, séjour en prison, veuvage, difficulté économique, etc.
Les catégories antiques associées au suicide
Dans l’ouvrage Le Suicidologue. Dictionnaire des suicidés célèbres, F. de Negroni et C. Moncel (2002) rappellent les catégories antiques associées au suicide :
- Taedium vitae : la lassitude de vivre, quand le suicide résulte d’une décision éthique ou philosophique ; on parle alors d’une mort choisie ;
- Valetudinisadversae impatienta : la maladie intolérable, quand le suicide abrège une vie vouée à une souffrance insurmontable (c’est le suicide euthanasique) ;
- Impatienta doloris : la souffrance morale insupportable, quand on met fin à une mélancolie insurmontable ;
- Furor : la folie furieuse, quand le suicide est particulièrement brutal ;
- Jactatio : l’affirmation d’une conviction, quand le suicide est chargé de promouvoir une cause ; il est alors geste sacrificiel, dûment mis en scène ;
- Pudor : l’autopunition, quand le suicide vient racheter une faute, ou l’honneur perdu. A travers les époques, c’est le suicide le moins contesté ;
- Substractio : quand le suicide permet d’échapper aux tortures et à une mort certaine ;
- Liberum mortisarbitrium : c’est, dans certaines sociétés (monde gréco-romain, Japon féodal), le droit laissé à un condamné à mort de se tuer lui-même : un pseudo-suicide ?
- Nullajusta causa : sans motif valable, quand le suicide reste imperméable à toute explication…
Le suicide doit se comprendre selon l’histoire singulière de la personne
Genet et D. Martz (La lumière noire du suicide, 2012) s’interrogent sur la nécessité de définir un tel classement des suicides selon leur cause.
Selon ces auteurs, c’est un procédé qui ne permet pas de conceptualiser le suicide comme objet d’étude et qui bloque l’investigation profonde des motivations inconscientes de l’individu.
L’explication du geste suicidaire doit s’articuler avec l’histoire singulière de la personne, son interprétation doit tenir compte de la dynamique de ses pensées et de ses affects.
Mais soulignons ici que l’investigation d’un tel acte suicidaire ne peut dépasser le stade de l’interprétation car, comme le soulignent H. Genet et D. Martz, le suicide est un « phénomène opaque […] sa signification ne relève que de l’interprétation, discours sur, dont la vérité ne peut être établie puisque le sujet s’est supprimé ». (p.27)
Malgré tout, même si le suicide représente cet acte irrévocable commis par tant de personnes différentes, il n’est pas exclu de tenter une première définition rassemblant des points communs.